Jacques Willemart, Les Echasseurs namurois, Luc Pire, 2016

Un album de prestige pour découvrir le folklore des échasses namuroises, un vrai plaisir pour les yeux, tant illustrations, photos et textes donnent l’envie d’assister de visu à un combat entre Mélans et Avresses au cœur de la capitale wallonne ! Mais avant d’applaudir ces vaillants guerriers haut perchés sur pattes, suivons l’auteur tout au long de sa belle histoire contée qui remonte au Moyen Age. L’origine des combats d’ échasses namuroises se situe au début du XVe siècle : indispensables lors des inondations provoquées par la Sambre et la Meuse, elles deviendront un jeu de plein air pour les enfants, pour les jeunes gens aussi qui s’affronteront entre quartiers rivaux ou pour animer les jours de fêtes, accueillir les personnalités et, de nos jours, après moult règlementations qui en limiteront au fil du temps les excès, pour constituer un des fleurons incontestables de la culture wallonne. On les verra battre le pavé aux quatre coins du monde, en Chine, aux Etats-Unis, au Canada, aux Seychelles, au Mexique…et animer festivals, carnavals et ferias de toutes sortes. L’auteur, ancien professeur à Namur et ardent échasseur lui-même (ne fut-il pas « échasse d’or » en 1972 ?) nous décrit avec un luxe de détails techniques tout ce qu’un curieux souhaite savoir sur cette pratique, à la fois riche en traditions, légendes et anecdotes et tout aussi passionnante à suivre qu’une rencontre sportive : qu’il s’agisse des échasses elles-mêmes et de leur fabrication, des habits portés par les combattants, des usages et règlements, du langage très imagé, des multiples conflits avec les autorités locales de jadis, de l’appartenance sociale ou locale des « chacheûs », des coups ou figures qui s’observent lors des joutes et de l’esprit frondeur et convivial surtout qui règne au sein de la confrérie. Dans un souci d’exactitude, l’expert se livre en plus à l’analyse fouillée des tableaux qui ont représenté ce folklore pour en relever les détails authentiques ou fantaisistes, tout en en soulignant la valeur historique et la beauté. Alons Namurwès/ su vos bokèts d’bwès/ dansez al rèbdèdèbè…, chantait-on jadis sur leur passage. Ce magnifique ouvrage donnerait bien l’envie au lecteur d’accompagner les badauds et de monter, à leur tour, sur une paire d’échasses pour voir l’actualité de haut, ce qui serait plus que salutaire par les temps qui courent, en Wallonie et même ailleurs… Un seul regret : si le livre contient un résumé en anglais, il n’est nulle trace d’une version, même courte, en néerlandais. C’est faire peu de cas des nombreux touristes qui nous viennent du Nord pour découvrir les trésors de nos provinces. Allons donc, partageons nos exploits d’échasses avec nos amis flamands qui hébergent de même dans leurs villages de formidables compagnies de géants des rues…

Michel Ducobu