rooseRoland Thibeau, Merci Monsieur Roose et autres nouvelles, Audace – La Roulotte théâtrale, 124 pp, 15 €.

Roland Thibeau est vraiment très doué pour les nouvelles fantastiques, dans la lignée de Jean Ray, et certaines des nouvelles ici rassemblées, notamment lorsqu’il y est question d’un cimetière, vous donnent froid dans le dos. Garanti: âmes sensibles s’abstenir.

Mais ce fantastique n’est pas innocent, ni purement artistique. Le réel lui aussi est fantastique, et, pour peu que l’on prenne du recul, devient effrayant de hideur, de lâcheté, de (fausse) bonne conscience..D’où parfois, en fin de nouvelle, une petite phrase vengeresse, une véritable flèche du Parthe. Il faut d’ailleurs prêter une particulière attention – je parle ici pour les écrivains en herbe, à ces fins de nouvelles, qui sont, chez lui, particulièrement soignées, et qui, toujours, dans une nouvelle, revêtent une particulière importance. Ainsi, dans l’Ado, un beau passage poétique: La nuit est claire et parfumée, une nuit comme on n’en voit plus, un oiseau oublié, au loin, accroche aux nuages les volutes de son chant., qui introduit, pour ainsi dire, ou plutôt sert de contrepoint à la phrase finale:

Jean entend la musique de ses pas sur les vagues des graviers et soudain, enfin, monte en lui une immense envie de pleurer.

Influence du théâtre, du cinéma? Je le crois, et les néophytes iraient avec profit faire un tour de ce côté. Mais le procédé pour le procédé, ce serait comme une machine à faire du vide. Il faut, comme ici, que cela colle au texte et y adhère.

Disons encore, pour terminer, et j’espère vous avoir mis l’eau à la bouche, que toutes ces nouvelles font preuve de la même maîtrise, et d’un style impeccable.

 

Joseph Bodson