Amour, amour.Dix nuances d’amour. Weyrich, 2014

amour– Eh quoi! me direz-vous, voilà dix nuances d’amour qui devaient colorer la Saint Valentin des lecteurs, et avril est grandement entamé!

– C’est que…

– Quelle belle excuse allez-vous encore m’inventer?.

– Il n’est jamais trop tard pour parler d’amour. Et puis, en avril, ne te découvre pas d’un fil, tandis qu’à la Saint Médard…et à la Sainte Catherine…Bref, parlons-en toujours, marquise, et si mon visage…

Les demoiselles de mes pensées: elles sont bien mignonnes, ces demoiselles de Bernard Gheur, ces lycéennes de l’aube des années cinquante. Et puis, bien sûr, il y a le cinéma. Et puis, les filles du patro. Bernard Gheur, avec une grande délicatesse de touche, a l’art de nous y ramener, comme sur un tapis volant – n’est-ce pas d’ailleurs la définition même du cinéma, ces images qui bougent, et qui font bouger le temps, sous le pavillon de la nostalgie? Je vous garde en moi. Vous êtes les demoiselles de mes pensées.

J’ai eu un coup de cœur à la lecture de Suns no swap, de Geneviève Damas. A l’image de ses pièces de théâtre, ce récit poignant est profondément enté dans la réalité, tout en gardant un pied dans le rêve. Bien sûr, nous le savions, il n’y a pas d’amour heureux, mais, nous le savions aussi, la plus grande des merveilles, c’est l’homme, et ce qu’il y a de plus merveilleux, de plus inventif en l’homme, c’est l’amour…qui est toujours, et partout, à réinventer.

Le jeune homme de Prescott, de Jean Jauniaux: un collectionneur de Don Quichotte. Hy! Guy! Une bibliothécaire quinquagénaire affriolante, à Prescott, bourgade du Texas. Et puis Zaventem, Melody. Un tableau qui représente…devinez? Un paysage de St Idesbald. Pour peu, on croirait le début d’un polar…Et cela finira par…Devinez encore…deux vers de La Fontaine, l’un des passages obligés de ce livre, car ce livre est aussi un jeu, avec des passages obligés. Amour, amour, quand tu nous tiens,/On peut bien dire: « Adieu prudence!

Françoise Lalande; Pas d’amour plus beau. Une jeune fille un peu narcissique à qui un malin démon ne présente que de jeunes voyous. Grave question: Qu’est-ce qui détermine, chez les hommes et les femmes, la conception de l’amour? La famille? Les romans? Avec tes histoires d’amour, on n’a que des embêtements, dit sa mère. Deviner qui va se profiler? Un marin tatoué, bien sûr. Mais l’amour, c’est ce qui anéantit.

Il y aura encore Le lion des Henanchas, de Daniel Charneux: pour un peu, on se croirait chez Joseph Kessel, Daniel Charneux nous dévoile là un nouvel aspect de son talent. Le chien qui aimait les chapons farcis, une gourmandise d’Eva Kavian. Deux merles et demi, de Xavier Deutsch, à Dayton, Ohio. Est-ce la faute à Dotty s’il faisait froid, et que M.Connor était là? Incipit, de Dominique Costermans: un dîner d’écrivains, de la délicatesse dans l’apprivoisement, une délicatesse tout aussi grande dans le délaissement…Le chêne et l’acajou d’Armel Job: des aveux étudiés, je ne vous raconterai pas la fin, ce serait tout gâcher, mais cela ressemble à une équation à deux inconnues. Enfin, Nadine Monfils, en apothéose. Landru n’est pas loin, mais c’était un homme charmant, Landru, et si délicat, si bien élevé, lui…

Bref, il y en a pour tous les goûts, pour ceux qui souhaitent se réconcilier avec l’amour, pour ceux qui veulent s’en débarrasser, pour ceux qui souhaitent le retrouver, ou bien, simplement, se le rappeler. Hélas, comme disait le gentil Clément, Plus ne suis ce que j’ai été/Mon beau printemps et mon été/Ont fait le saut par la fenêtre, c’est cela sans doute qui est cause de mon retard. Ouf! Enfin une bonne excuse! Mais, si vous avez un anniversaire en vue, n’hésitez pas…

Joseph Bodson