Anne Grauwels, Une Année douce, M.E.O., 2016

Se situant entre le journal intime et la fiction, le  premier roman de Anne Grauwels, nous décrit dans le détail la relation compliquée d’une femme avec deux hommes, un écrivain qui va devenir son amant et un amant  qui va cesser de l’être, sur fond de psychanalyse dont le rôle sera, dans ce cas-ci, d’éclairer son parcours hésitant et contrarié tout autant que d’approfondir d’autres sujets plus intellectuels et moins sensibles. Le récit nous plonge dans la vie d’une femme de notre temps, habitant Bruxelles, juive par ses parents, ex-militante communiste et très branchée artistiquement. Le lecteur découvre son mode de vie assez libre, ses soucis, ses problèmes de santé,  ses projets, ses loisirs  et, bien entendu, les questions qu’elle se pose sur le « fonctionnement » des hommes dans le domaine sentimental. Parmi ses projets, un livre à écrire avec l’Ecrivain sur la Belgique, vue à la fois par la flamande d’origine qu’elle est et, en miroir, par celui qui va devenir son amant éphémère, un francophone bruxellois connu dans le monde littéraire mais dont le nom n’est évidemment pas cité. Le livre vaut par le naturel qu’Anne Grauwels met dans son écriture et l’intérêt des sujets qu’elle aborde avec ses analystes successifs. On parcourt avec elle quelques coins attachants de la capitale, comme le Petit-Sablon, la librairie Tropismes, les cités-jardins de Watermael-Boitsfort, la taverne Moeder Lambic et d’autres lieux inspirés, pittoresques ou gourmands… Un roman fort introspectif, rédigé entièrement à la première personne, grave ou léger selon l’humeur ou la disponibilité des partenaires, qui s’achève le jour de la fin du monde manquée, le 21 décembre 2012, sur un incident providentiel : le vol de l’ordinateur de l’auteur qui contenait toutes ses impressions et réflexions relatives  à sa vie amoureuse. Repartant à vide, elle passera de la sorte du journal intime et vrai à l’autofiction, un genre de plus en plus répandu de nos jours, et que d’aucuns considèrent comme un moyen commode pour l’écrivain de transformer certains éléments de sa vie dont il ne serait pas entièrement satisfait…

                                               Michel Ducobu