libert.jpgBéatrice Libert, Demeures de l’éveillé, poésie, préface de Michel Lagrange. Les Poètes de l’Amitié, Dijon, 2015, 10 €.

Il faut tout d’abord signaler que ce recueil a reçu le prix d’édition poétique de la Ville de Dijon, 2015. Il est divisé en trois demeures: Lisibles chemins, Précaire abri, Petites prières pour ne pas mourir de froid. Les titres mêmes de ces demeures évoquant, bien sûr, la précarité, le peu, si pas la crainte, le repliement sur soi. Et, de fait, le recueil débute sur des mots assez sombres, évoquant le combat, l’échec, la souffrance, ainsi dans Verrous, p.15:

Un ciel s’avance au plus profond de nous

Il pleut sur nos paumes abandonnées

Il pleut sur nos épaules sur nos corps amoindris

Les horizons verrouillent leur regard.

(…),

mais avec çà et là un vers qui est comme une embellie, ainsi p.16: La pluie chantait la patience de vivre. A la page 22, la métamorphose se fait métaphore, et métaphore de la durée, de la patience.

La page 37 établit le rapport avec le ciel, l’espérance: Rien à voir avec la douleur/Mais avec l’espérance/Et ce ciel qui s’ouvre en toi/Comme une semence. Il y a là une sorte de minimalisme franciscain, dans l’évocation de ce qu’il y a dans la nature de plus basique, le désert, la pierre. Et la souffrance nous ramène à l’essentiel, p.20: Sur quelle mer lentement s’achemine/Ta plaie d’ombre/Que des oiseaux becquettent vive?, ainsi qu’à la page 26, les deux derniers vers de Humus, qui sont superbes, par le contraste de la mort et de l’enfance: Celui qui ouvre dans un cri pâle/La chanson des enfants vieillis. De même, p.27, les deux derniers vers d’ Ulysse: Ulysse! Quelle neige s’éprend de ton doux repartir/Et sème du levant sur ce qui va finir? De nombreuses interrogations, on le voit, qui ne trouvent pas toujours une réponse, et dans lesquelles l’humilité des questions se mêle à la hauteur de l’inspiration.

Joseph Bodson