Bernard Gheur, Liège 1944 – Le 1er Américain,  Weyrich,2014, 98 pp, nombreuses illustrations. 25 €.

liège 1944On connaît l’attachement de Bernard Gheur à sa bonne ville de Liège, et, comme on écrit surabondamment, pour le moment, à propos de la Première Guerre, il n’est pas mauvais, n’en déplaise à certains, que l’on se souvienne également de la seconde

Vu l’âge de l’auteur, ces souvenirs ont aussi un parfum d’enfance. Lui-même était enfant, et les enfants figurent très nombreux sur les photos reprises ici, tout spécialement en compagnie des premiers Américains, avec eux, sur leurs chars et leurs jeeps. Des textes-témoignages, des photos de toute provenance forment une trame serrée et très complète autour de la Libération, depuis la fuite des Allemands, en vélo, en charrettes réquisitionnées, et l’arrestation des collaborateurs, jusqu’à la délivrance des prisonniers dans les camps de concentration. Celle du professeur Léon Halkin, retrouvant l’un de ses anciens élèves, engagé dans l’armée américaine, est particulièrement émouvante. Il y a aussi bien sûr les images navrantes des maisons détruites, les dégâts causés par les V1 et les V2 – plus de 2500 tués, Liège fut la ville au monde la plus touchée par ces engins. Mais bien sûr, à côté de ces ruines, de ces scènes de désolation – et la pire fut sans doute le corps de ce gamin en culottes courtes, retrouvé parmi un groupe de fusillés laissés là par les Allemands avant leur départ, il y eut aussi la joie des prisonniers libérés de la prison de Saint-Léonard, et dont certains avaient été condamnés à mort:  Jean Lewalle, qui habitait en face de la prison, en témoigne (p.50):  Nous avons vu tous ces hommes dont certains étaient des condamnés à mort, danser dans la rue comme des fous. Quelques-uns portaient des traces de sévices sur le visage ou sur les mains. Il y a aussi toutes ces scènes de liesse, à Liège, à Spa, où était fixé, cet hiver-là, le QG de le Armée américaine. Et puis, surtout, surtout, cette émouvante solidarité des gens réfugiés dans leurs caves, quand tombaient les V1 et les V2 lancés depuis l’Eifel.

Non, rien n’y manque, ni la description détaillée de l’armement des soldats, ni l’énumération des produits, alimentaires surtout, dont ils ont fait bénéficier les civils, et qui du coup se sont implantés chez nous.

Le livre est dédié à la mémoire d’Alain Bertrand, qui s’y était intéressé, et à celle de John Gheur, père de l’auteur, lieutenant de réserve au 1er Lanciers, combattant de l’Armée secrète dans le maquis d’Erezée.

Joseph Bodson