Christian Libens, La Forêt d’Apollinaire, Weyrich, Plumes du Coq, 2013, 184 pp.forêt d'apollinaire

 

Un livre tout plein de fraîcheur, d’eaux murmurantes et de péripéties variées.

Je soupçonne fort Christian Libens d’avoir usé de subterfuge, et de s’être glissé dans la peau de son jeune instituteur pour accompagner Guillaume dans ses balades, divagations, joyeux propos dans la forêt stavelotaine et spadoise. Il lui ressemble en tout cas comme un frère. Certaines scènes ont le charme de ces photos sépia que tiraient les photographes d’autrefois – l’une des scènes initiales n’est-elle pas celle où se tire le portrait de Marèye?

Oui, un livre frais comme un bouquet d’images un peu – si peu – surannées, qui ont gardé tout leur charme, où s’entrecroisent les thèmes chers aux amoureux de l’Ardenne: les bonnes plantes, le pèket, la marche dans les bois, les joyeux devis et succulentes fricassées. En faut-il plus pour être heureux en Ardenne, où l’on fait beaucoup avec ce qui, ailleurs, serait du peu? Oui, le secret du bonheur, l’ici et le maintenant, la permanence du lieu au-delà du temps, en cette forêt d’Apollinaire qui n’a rien à envier à celle de Brocéliande.

Je peux juste vous dire qu’il y sera question de ce bon vieux Merlin, bien sûr. Et un Merlin terriblement amoureux, le pauvre! (Il s’agit bien sûr du projet de l’Enchanteur pourrissant)

Mais son Ardenne, loin d’être éthérée et perdue dans les nuages, est aussi une Ardenne rudement vivante, et bien vivante: on y boit sec, les plaisanteries sont drues et les femmes bien en chair – toutes choses qu’Apollinaire était loin de mépriser. Le portrait n’en est que plus vrai: Le poème de la chair qui vit (p.162).

Joseph Bodson

(Il s’agit ici de la nouvelle édition d' »un ouvrage paru chez Quorum en 1992)