Emmanuel Mahieu  – Itinéraire d’un anti-héros – Editions E.C.P. – 388 pages – 10 €

Emmanuel Mahieu, aîné d’une famille de six, nous livre ici une tranche de sa vie, celle de ses études supérieures, gravement bousculées par un accident de moto, mais qu’il finira par mener à bien, à force de travail et de volonté. Les jours et les années se déroulent au fil des pages, dans l’ambiance des années soixante, entre Mouscron, Leuven et Coxyde, entre famille et copains, copines, amis, sans oublier les professeurs, tous aussi présents et précieux pour lui. Quoique personnel, cet écrit semble destiné à la publication étant donné les précisions émises quant à la composition de la famille ou de différentes relations. « La sœur de Maman, notre tante et marraine à tous » est ainsi précisé plusieurs fois. L’auteur prend plaisir à évoquer ses souvenirs et à les partager avec ceux qui y sont mêlés et d’autres lecteurs éventuels, reprenant les événements, les ressentis, les doutes et les émotions. Il est doté d’un esprit tranquille, romantique et tourné vers la nature, dans un élan fréquent de poésie. Respectueux des jeunes filles qu’il rencontre, il se montre un ami sérieux et prévenant mais n’entame aucune relation amoureuse pour l’instant.

Le lecteur peut revivre à travers ce récit les événements qui ont marqué les années soixante. L’auteur a connu personnellement à Louvain « l’agitation économico-politique, sous couvert linguistique, au rythme des descentes régulières des hordes extrémistes d’étudiants flamands venues des grandes villes et des Flandres profondes », au cri de « Leuven Vlaams » et « Walen buiten ». C’est raconté sans animosité et les francophones, tout comme les néerlandophones en kot avec eux, se rendent compte que ni les uns ni les autres ne savent très bien pourquoi ils s’affrontent et l’on comprend qu’il y a derrière tout cela une manipulation politique. L’ouvrage se laisse lire, bien qu’il n’échappe pas, c’est la loi du genre, à une certaine monotonie des jours et des années qui se suivent et se ressemblent, avec quelques redites ou impressions de déjà-vu. Une vie toute simple, en somme. Mais pour qui connaît les lieux et l’époque, il est émouvant de cultiver la nostalgie du souvenir et de se dire qu’on a connu tout ça, nous aussi…

Isabelle Fable