Françoise Houdart, Victoria Libourne, éd. Luce Wilquin, 2014, 190 pp, 19 €.

victoria
Françoise Houdart ou la tendresse…Je ne connais point d’autre auteur qui témoigne envers ses personnages une telle empathie, il n’en est aucun, chez elle, envers qui elle ne manifeste une attention, une perspicacité, des qualités d’analyse psychologique aussi évidentes. On dirait, vraiment, que pendant les mois où elle a « porté » son roman, elle n’a cessé de songer à eux. Et cela, sans aucune mièvrerie: simplement, comme le disait, je crois, Albert Camus, parce qu’il y a en l’homme plus de choses à admirer que de choses à détester. Nos broyeurs de noir feraient bien d’en prendre de la graine. Et cette analyse, elle la mène sans aucune lourdeur, dans un style fluide, léger, j’ai presque envie de dire arachnéen…

Et puis, vous diriez toujours qu’elle progresse à cloche-pied, un pied dans la réalité, un pied dans le rêve. Le vraisemblable côtoie l’invraisemblable, et ils finissent par déteindre l’un sur l’autre. Est-il vraisemblable qu’un inspecteur de police mène une enquête sur…Sur quoi, en fin de compte? Sur une place vide sur un banc. Sur un corps que personne ne réclame. Sur un vagabond accosté par une jeune femme et un enfant. Sur une femme qui s’appelle Victoria Libourne, ou qui s’appelait, là, bien loin. Sur un autre banc, au bord de la Garonne. Sur un rat blanc en peluche oublié sur cet autre banc. Mettez donc tout cela ensemble, et vous aurez la clé de l’énigme. Mais attention! Malgré la présence de l’inspecteur, ce n’est pas une intrigue policière. Ou peut-être, l’inspecteur a-t-il lui aussi oublié quelqu’un en route. Comme l’espoir et l’amour, l’absence a ses caprices.

Et tout cela est mené de main de maître, sans avoir l’air d’y toucher, et sans qu’un seul instant, l’intérêt du lecteur faiblisse.

Rappelons que Françoise Houdart a reçu le Prix triennal de littérature de la province du Hainaut.

Joseph Bodson