Bruxelles a offert en 2015 à l’artiste Gao Xingjian, de son vivant, ce qui est chose rare, la plus grande rétrospective de sa carrière, dans deux musées prestigieux de la capitale : le Musée d’Ixelles, pour les tableaux, et les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique pour six œuvres monumentales spécialement conçues pour un nouvel espace, la salle Bernheim.

Gao Xingjian, auteur prolifique, artiste prodigieux, Prix Nobel de Littérature en 2000, Français d’origine chinoise – né à Ganzhou, en 1940 – se veut un « passeur » entre le monde oriental et le monde occidental où il s’est intégré. Contraint à l’exil en 1987, il vit en France, où il a obtenu l’asile politique, depuis 1988. « Passeur » entre deux mondes, mais aussi entre deux formes artistiques, la peinture et l’écriture, l’artiste est également scénariste, metteur en scène, et a traduit en mandarin des auteurs comme Prévert, Ionesco, ou encore Michaux.

En quête de sublime, l’exposition « Gao Xingjian. Rétrospective » offre un voyage initiatique propre à nous ressourcer en ces temps incertains, constate Michel Draguet, commissaire de l’exposition à Ixelles.

Rien de figé, en effet, ou d’étiqueté, dans l’œuvre puissante de cet artiste contemporain, résolument à part. Œuvre expressive, mais explorant les subtilités de l’âme, dont la portée est intemporelle autant qu’humaniste et universelle. Tout y est apesanteur, pensée ailée…

Je pense que de nos jours, si on veut encore faire de la peinture et revenir à l’image, il faut chercher d’autres voies possibles. C’est ce qui est particulier dans mon art.

 Peut-on encore trouver une voie entre elles, qui ne soit ni figuration, ni abstraction, ni représentation, ni expression ? Je trouve qu’il y a encore d’autres possibilités, un espace très vaste à explorer entre abstraction et figuration. L’évocation ou la suggestion, par exemple. C’est mon orientation, ce que je cherche dans mon travail pictural, explique Xingjian dans une interview accordée au Musée d’Ixelles.

 

L'attente

 

Ce qu’il y a de particulier dans la double exposition de l’artiste, c’est qu’il utilise aussi bien l’encre de Chine et le papier, matières plutôt orientales, que la peinture sur toile, dont le châssis et la toile sont traditionnellement  liés à l’Occident. Deux matières donc pour une œuvre purement picturale qui laisse une place prépondérante à l’imagination de chacun. L’artiste évoque, suggère, sans rien imposer, ce qui titille, entre autres, l’esprit créatif des écrivains car chaque tableau pourrait illustrer une œuvre littéraire, ou l’inspirer…

 En fait tous mes tableaux, toutes les images que je crée peuvent être vus de façon très littéraire, quelques fois philosophique, voire même métaphysique. (Archives Musée d’Ixelles).

 Noëlle Lans

 

Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique