Hélène Bléré  –  Le langage de l’icône. Lumière joyeuse. Racine, 303 pages, 29,95 euros.

On connaît l’interdit de la représentation dans le Judaïsme et l’Islam. On connaît moins l’iconoclasme chrétien qui donna lieu à des luttes féroces. Ainsi un théologien contemporain parle-t-il de « la brèche de l’icône »[1]. Et c’est avec l’icône qu’on va rencontrer  l’expression de l’Orhodoxie. C’est dire qu’elle est essentielle, à ce point qu’Olivier Clément souhaitait  que « le peuple de la Bible rencontre le peuple de l’icône »[2].

Un des mérites du présent ouvrage est d’avoir été  rédigé par une iconographe. Ainsi, le contenu spirituel de l’icône va-t-il nous être ici révélé par la description des procédés picturaux et symboliques qui l’expriment. La lumière et la couleur vont  trouver une traduction théologique, leur théophanie. On n’oublie pas que l’icône nous conduit à la source de l’image, à l’archétype invisible[3]. L’on verra aussi que le peintre d’icônes n’est pas livré à sa fantaisie, mais se trouve tenu par une ascèse. Au plan iconographique, cet ouvrage se révèle particulièrement précieux par cela qu’il nous donne à voir, à la fois, des icônes contemporaines et des dessins, des esquisses préparatoires « qui révèlent combien le message théologique de l’icône s’inscrit déjà, à ce stade, dans les formes et les compositions transmises par la Tradition » (p. 12).

Cinq chapitres se partagent un texte à la fois empreint de spiritualité et riche en précisions « techniques » : de l’icône du Christ Pantocrator à celle de la Mère de Dieu, Vierge de Tendresse, retenus par la Lumière, nous parcourons « le cosmos transfiguré » et  « l’espace-temps du Royaume ». Mis ainsi au fait du langage de l’icône, de sa spécificité, nous sommes amenés à reconsidérer notre perception des rapports entre Dieu. Le ciel et la terre seraient-ils réconciliés[4] ?

                                                                                              Michel Westrade

[1] B. CHENU, La trace d’un visage, Centurion, 1992, pp. 115 et sq.

[2] Olivier CLEMENT, Dialogues avec le patriarche Athénagoras, Paris, Fayard, 1969 , p. 462.

[3] Moine Grégoire G.I. KRUG, Carnets d’un peintre d’icônes, L’Age d’Homme, 1983.

[4] Sur l’icône et la liturgie, v. Michel EVDOKIMOV, Lumières d’Orient, Droguet Ardant, 1981.