9780336001070j

Josée Viellevoye, Le Signe. Pour ceux qui resteront, éd. L’Harmattan, 102 pp,12  €.

Quand se termina la guerre de 1914, vu que beaucoup de familles étaient toujours sans nouvelles d’un de leurs membres, le besoin de savoir, lancinant, se traduisit par une attirance très grande pour la communication avec les défunts. En certaines circonstances dramatiques, comme celle-là,  ou bien le spectacle de la fin d’un proche touché par le cancer, la question de la survie, et de la communication entre morts et vivants, se pose avec une acuité beaucoup plus grande que d’habitude

Ici, ce que nous raconte Josée Viellevoye, dans la première partie de ce livre, c’est la longue lutte d’une mère atteinte d’un cancer, qui se croit d’abord guérie, pour subir ensuite une brutale rechute. Elle sera accompagnée tout au long par le regard attentif de sa fille, ses soins prévenants. Dans cette première partie, c’est le journal de la mère qui nous est livré.. Une vision très concrète et très directe de ces moments-là, où l’on guette une réponse: des objets, des gestes voient soudain leur puissance surmultipliée Les rapports de l’héroïne avec ses parents, ses enfants apparaissent sous un autre éclairage. Avec, p.63, cette question angoissée: Pourquoi la route qui mène à la mort est-elle si pénible?

Viendront ensuite les souffrances dues au zona, la diminution progressive de ses forces, jusqu’au moment où le récit s’arrête, pour être relayé par celui de sa fille. Elles se sont promis un signe, après la mort de l’héroïne. A ce moment, on est à la recherche du moindre indice, mais en fait, c’est tout qui devient signe, et la présence/absence de l’être aimé ne cesse de nous envelopper. Croyez-vous donc qu’un lien aussi intime que celui qui unit une fille à sa mère, la chair à cette autre chair qui a été sienne, puisse disparaître sans laisser de trace? J’en ai eu des signes!/Dans les nuages, lors de mes promenades: une forme qui prend le visage de maman/Sur les sentiers poudreux de pays lointains: un enfant qui vient à ma rencontre et me dit une phrase étonnante, comme s’il me connaissait, comme si on lui avait parlé de moi.

Tout parle à la mémoire qui écoute.Et si la première partie du livre est le récit d’un combat perdu, la seconde porte un espoir un peu fou. Mais peut-être y a-t-il plus en notre mémoire, en nos gènes, que ce que nous supposons.

Précisions que Josée Viellevoye a subi elle-même les atteintes d’un cancer, dont elle a pu guérir.

Joseph Bodson