Les poètes du Taillis Pré, une anthologie partisane, Yves Namur, Le Taillis Pré, Chatelineau, 2014.

 

On raconte que les auteurs de dictionnaires, pour illustrer les définitions de leurs ouvrages, choisissent des exemples qui racontent leur vie. Autobiographie déguisée en somme. S’agit-il de même, ici, dans cette somptueuse anthologie signée par Yves Namur à l’occasion des trente ans de sa maison d’éditions Le Taillis Pré ? Aucune certitude, bien sûr, mais une simple supposition, à la lecture des poèmes qu’il a réunis en séquences, portant pour titre, une expression venue tout droit des pages de l’autre. Et quel voyage dans la poésie contemporaine issue de tous les horizons, nourrie de toutes les sensibilités, de toutes les écritures ! Bonheur aussi de lire, à côté de noms reconnus voire célèbres, les textes de jeunes auteurs que Namur veut porter à notre connaissance.

Ce livre est un cadeau et il le sera magnifiquement sous le sapin de Noël pour ceux qui aiment la poésie ou qui souhaitent la faire passer.

Alors pour y goûter, voici trois émotions, en guise de hors d’œuvre et en hommage à l’auteur de « La petite cuisine bleue ».

 

Antonio Ramos Rosa

 

JE te veux dans la maison intacte avec les eaux

entières : tu n’as pas fermé l’ouvert : tu es son entrée. Je ne suis pas un rêve car tu me veux : je mords ton nom sur les rives nocturnes. Ton corps terrestre respire, ouvre les yeux sous les racines, monte jusqu’à la splendeur monotone de l’espace. (Trois leçons immatérielles)

 

 

André Miguel, dès la fondation des éditions, fut le compagnon de route d’Yves Namur avec sa compagne Cécile.

 

Calme muet

 

Que chercher puisque les entrailles

De la terre battent en nous

 

Que dire puisque le chant muet

Monte en nous

 

Que penser puisque le ciel

Se repose derrière nos yeux clos                  (Voix multiples)

 

 

Rose-Marie François évoque, ici, sa passion de la traduction poétique.

 

Traduire

 

Māra demande ce que j’écris.

Je lui lis ma musique ou lui renvoie la sienne dans ma langue.

La poésie traduit la poésie.

Solfège rime avec sortilège.

 

Autour de nous : la nuit, la vraie, avec des nébuleuses jusqu’à l’horizon et le silence noir de l’encre qui célèbre un conte ancestral.

 

Des hectares de forêt nous protègent.

Contre quoi, au juste ?

Qu’importe. Ils nous protègent.

Mieux vaut, peut-être, ne pas savoir de quoi.   (La Saga d’Îchanâs)

 

Ce florilège sous-titré « une anthologie partisane » est une porte exceptionnelle vers des livres dont on sait qu’ils seront, sous la lampe, des compagnons de beautés.

 

 

Béatrice Libert, Liège, ce 10 octobre 2014.