Louis Savary, Les mythes de la mémoire, éd. Les presses littéraires.

Je l’avais déjà noté, je crois, à propos de son précédent recueil: si le talent, la verve de Louis Savary restent pareils à ce qu’ils ont toujours été, sa façon d’envisager la vie, d’en percevoir en même temps – et c’est partie de son charme – les côtés drôles et les côtés ténébreux, donnent à ses écrits une profondeur nouvelle. « Débris de poésie – des bruits de ma vie » nous dit-il en exergue, et c’est bien de cela qu’il s’agit.

Mais écoutons-le plutôt,  p.3: ne reste plus dans ma tête/que l’écho d’un cri/à l’infini du silence. Page 4: que sont devenus/tous ces mots/qui m’ont entendu grandir. p.11: mes mots s’envolent//par dizaines/mes mots s’évadent/il est temps de mettre les scellés/sur les portes de ma bibliothèque. Pour un peu, on croirait entendre le bon Clément Marot, qui chantait en son vieil âge: Plus ne suis ce que j’ai été/et plus ne saurais jamais l’être/Mon beau printemps et mon été/ont fait le saut par la fenêtre.

Et puis encore, p.18: perdre la mémoire/enfin dialoguer/avec le néant, et page 20: en quête à jamais/de mots anciens/qui ne savent pas lire, et puis, page 24: j’ai follement aimé les mots/trop de coups de foudre évidemment/ont dû consumer ma mémoire.

Mais, holà, que vois-je, madame: vous lisez par-dessus mon épaule! Cela ne se fait pas, madame. Achetez plutôt le livre, il ne vous en coûtera que 15  €, et vous y trouverez, sans mentir, de quoi méditer, rêver, vous enchanter: tels sont les mythes de la mémoire, leurs leçons, leur mystère: un retour aux pays d’enfance, quand on a oublié tout le reste. Un défi au temps, une pelote de laine qui tantôt s’emmêle et tantôt se dénoue. Alors, n’hésitez pas, et rêvez bien en sa compagnie. Vous ne le regretterez pas.

Joseph Bodson