Louis Savary, Je tue il, aphorismes, Les Presses littéraires, 102 pp., 15 €.

Supposons que l’on vende des attrape-mots comme autrefois des attrape-mouches, et que viennent s’y prendre, pour celui qui prétend écrire, les mots qui lui collent le plus au cœur, les mots qui le dépeignent et le décoiffent le mieux, qui le passent au rasoir et au scalpel, ou au laser même, jusqu’à ne plus laisser de son moi, de son lui, que la peau rêche sur les os:: c’est l’ entreprise dangereuse, l’exercice d’équilibre auquel se livrent les auteurs/fauteurs de maximes et d’aphorismes.

louis savary

Louis Savary s’y est attaché depuis bien longtemps déjà, c’est un vieux routier en la matière, et il n’est pas besoin de dire qu’il passe brillamment tous les obstacles.

Alors, Louis Savary, un faux dur, un faux tendre? Ou bien un peu des deux? Une sorte d’hybride? A vous d’en juger:

p.7: J’ai perdu/cette fâcheuse habitude/ de me raccrocher/à mon cordon ombilical.

p.26: J’écris à tombeau ouvert/sans un regard/pour ces mots/qui ratent le virage

p.34: je vous aime/comme je vous parle/avec les mots cinglants/de ma tendresse

p. 36: j’écris aussi pour les mésanges/avec des mots insaisissables.

p.49: j’écris en chute libre/un poème rebelle/qui ne craint pas/de s’écraser sur la page.

p.55: la poésie n’est pas/un havre de paix/qui s’est libéré du vacarme/elle est le vacarme

p.78: l’avenir/c’est quand/je ne serai plus là.

p.84: de vie à trépas/tant de mots/pour ne dire/que ça.

J’en passe, croyez-le bien, et des meilleures…A vous de chercher plus loin…

Joseph Bodson