Marc DANVAL, Robert GOFFIN, Avocat, poète et homme de jazz, De Arthur Rimbaud à Louis Armstrong, Le Carré Gomand, 2014, 254 pages, 23,50 euros.

Etre polymorphe, paradoxal comme toutes les natures riches. Ainsi nous apparaît, sous la plume alerte, vive et colorée de Marc DANVAL, le personnage de Robert GOFFIN.
Enfant Naturel, né à OHAIN, il réussit à dépasser cet enfermement où aurait pu le murer sa condition. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne fut pas quelqu’un de triste. Sans façon, au-delà des règles : se levant de table avant le Roi, invitant ses confrères des Biennales de Poésie à visiter les sex-shops de Sluis… L’homme était généreux, « ivre de vérité, liquidateur des préjugés » : tel nous apparaît Robert GOFFIN dès les premières pages du beau livre de Marc DANVAL.
L’homme est trop riche pour que l’on puisse ici dresser un tableau complet de ce que fut son existence ( 1898-1984). On se bornera à en épingler quelques traits. D’abord, l’avocat, le talentueux défenseur de Malou Gérin, accusée de complicité d’assassinat : c’est l’éloquence de DUPONT-MORETTI qu’on nous donne ici à entendre !
Retenons aussi le romancier , entre L’Apostat (1934) et Le Roi du Colorado (1958) avant d’aborder l’homme de jazz et le poète. L’homme de jazz, dont Carlos de Radzitzky devait dire : « Goffin jouera vis-à-vis du jazz le rôle d’un Apollinaire vis-à-vis du cubisme ». Boris VIAN voit en lui le premier critique de jazz (Jazz Hot, 8 mai 1954), avec un premier texte paru en 1922 dans Le Disque Vert de Franz HELLENS. Il en a écrit, mais on dira de lui qu’il a vécu le jazz et on se bornera à citer son histoire du jazz parue en 1945, où il est notamment question de… Louis Armstrong. Aussi bien, connaîtra-t-il les plus grands. Pour ce qui est de la poésie, on est conquis dès le premier recueil : Rosaire des Soirs (1918). Il faut tout lire de lui, jusqu’au Champ de mai (1982). Le découvrant par Marc DANVAL, on se dit, comment, je ne connaissais pas ? Ecoutez, pris au hasard : « Mes lèvres ont largué les amarres des belles »….
Essayiste, il le fut aussi, et il donnera toute sa stature en nous entretenant notamment de Rimbaud, d’Apollinaire, de Mallarmé…. On voudrait, continuant la lecture, découvrir Entrer en poésie (1948) ou Fil d’Ariane pour la poésie (1964), tant il est vrai que c’est le propre des beaux livres que de donner à en découvrir d’autres….. Et puis, il faut le dire : merci, Marc DANVAL de nous avoir donné à connaître ce Belge, cet homme de chez nous, ce pays qui, ainsi que vous le dites dès la première page, ignore ses grands hommes.

Michel WESTRADE
16 février 2015