Philippe Veyrunes – Un ami est passé –éd. Les Presses Littéraires – 228 pages – 13 €

 

Dans le registre fantastique, ce récit s’ancre à la fois dans l’imagination d’un enfant qui raconterait une histoire et la minutie d’écriture d’un auteur chevronné qui veut nous y faire croire.

Le roman met en scène un récit de voyage hors du temps, servi par une écriture serrée, riche d’une infinité de détails et de termes précis, parfois précieux ou prétentieux.

Henri Dausset et sa fille Isabelle habitent un immeuble classé, datant du XVIIe siècle, et reçoivent un jour la visite d’un certain Fabien Dalbrecq, qui va les entraîner dans la recherche d’un objet mystérieux caché chez eux, en lien avec le passé mais aussi avec le présent. Avec menace à la clé pour faire bonne mesure. En parallèle avec cette aventure, qui les inquiète et les passionne à la fois, Dausset et sa fille mènent une vie normale : il est architecte et chargé d’édifier un nouveau théâtre dans la périphérie de la vieille ville, elle est lycéenne et se prépare au bac. Son frère Frédéric est allé faire sa vie de musicien à Paris, et ça ne plaît pas à Dausset.

Et l’histoire se déroule, lentement, comme le fleuve qui longe la ville (Auxeuil), avec tous les détails, profusion de détails, poétiques ou concrets, à propos de tout et de rien, toutes choses destinées sans doute à mieux ancrer le fantastique dans la réalité la plus quotidienne. Mais cela ralentit le récit en dispersant l’attention du lecteur, surpris par cette abondance d’adjectifs et par certaines images, originales à l’excès : « l’eau du bassin, à demi maquillée par des nénuphars »…

Le mystérieux Dalbrecq fait un peu figure de directeur de conscience, si ce n’est de conscience tout court, il veille, il surveille l’architecte et ses agissements, il a une mission à remplir à tout prix, concernant les Dausset – et tous les futurs occupants de l’immeuble. Une mission sacrée au delà du réel, dans un halo mêlant habilement passé et présent, pour mener le lecteur au bout de l’histoire. Mais l’auteur semble hésiter sur la proximité à donner à ses héros, qu’il appelle indifféremment tout au long des pages « Henri » ou « Dausset » et « Fabien » ou « Dalbrecq ». C’est un peu déroutant, ce décalage perpétuel entre proche et lointain, ce va-et-vient entre histoire de famille et fait divers. Bien fait pour nous mener en bateau d’un bout à l’autre de cette étrange aventure !

 

Isabelle Fable