Werner Lambersy, Opsimath, Soligny-la-Trappe, Atelier Rougier, coll. Plis urgents, 2013, 80 p.

lambersy   opsimathDans l’élégante présentation de l’éditeur (ce qui n’empêche pas quelques coquilles typographiques), Werner Lambersy, accompagné d’images allusives d’Anne-Marie Vesco, se livre à une sorte d’inventaire de la sagesse qu’une existence intensément vécue est susceptible d’engendrer. C’est ce que suggère un titre dont le sens est « qui apprend sur le tard ».

Il y a comme une modestie dans son propos d’individu arrivé à son ultime étape d’existence. Il affirme, par exemple, que « Les hommes doivent peu / aux poètes / à part de survivre au pire ». Mais sa parole « célèbre ce /qui est ». C’est essentiel au cœur d’un monde qui s’autodétruit.

Il y a là la lucidité de quelqu’un qui a « les mains dans les poches / de la réalité » à travers les vers de ce recueil qui prend pour thèmes « l’amour / la mort et l’effroi ». La jeunesse passe, « demain / est un oiseau sans aile ». La civilisation est gangrénée par « les métastases / totalitaires du profit ».

Les poèmes se déroulent entre le clair et l’obscur, le charnel et le philosophique, le visible et l’invisible, le présent et un passé avec ses « rhizomes / amers de la mémoire » devenu sans avenir. Donc « entre l’instant et la durée », entre l’humain et le divin de « dieux / dont on n’a que le braille ».

Comme à son accoutumée, Werner Lambersy orne ses textes de ces métaphores au génitif qu’il affectionne. À travers un vocabulaire de simplicité directe, il place de temps à autre la surprise musicale d’un mot rare, sonore, étrange. Il nous laisse un message de méditation avant le suprême exil :

« Je suis vieux et personne

Ne m’a cru

Aujourd’hui

Depuis longtemps je sers

Gardien

Du vide pur et des encens »

Michel Voiturier