Les exilés belges en France, histoires oubliées 1914-1918, par une réunion d’auteurs, Racine, 2017

Durant la Grande Guerre, 350.000 Belges se sont exilés en France. Loin d’être des privilégiés, la plupart d’entre eux ont contribué à l’effort de guerre. Cet ouvrage a pour objet de montrer par quels moyens ces Belges du Dehors ont œuvré dans les domaines militaires et industriels à la recomposition des forces nécessaires pour contrer l’invasion allemande.

L’ouvrage est divisé en 8 chapitres. Le premier concerne la refonte de l’armée belge et la création du complexe militaro-industriel du Havre. C’est en effet dans l’agglomération havraise que s’était installé le gouvernement belge en exil. Le Havre devint le poumon industriel de la Belgique libre.

Le chapitre II relate l’histoire étonnante de ce groupe de quelques centaines de réfugiés wallons qui, partis de la région de Philippeville et Couvin, arrivèrent à Bonnières-sur-Seine et à Bennecourt, non loin de Mantes-la-Jolie. Parmi eux, Louis Piret, maître de forges à Thy-le-Château, où il dirigeait les usines métallurgiques Saint Éloi. Arrivé dans les Yvelines, il loua des bâtiments désaffectés et y installa une usine métallurgique où travailleront 200 Belges. Cette communauté se développa tout au long de la guerre, créa son école, son service de santé, son ouvroir, son home pour soldats permissionnaires et son Journal.

A l’inverse, en 1917, les Allemands firent évacuer 10.000 habitants de la commune de Lens et les envoyèrent à Thy-le-Château, actuellement jumelée avec Bonnières. Ils firent partie de ces centaines de milliers de Français évacués de force de la zone de combat par les Allemands, sur une ligne de front qui va d’Arras à Reims.

D’autres chapitres exposent d’autres aventures ponctuelles de réfugiés belges en France. Le chapitre VII développe une réflexion : Ce que nous racontent les traces des exilés civils belges de 14-18 en France, par Isabelle Masson-Loodts. L’auteur observe que des cimetières militaires et des monuments témoignent de la présence belge en France pendant la Grande Guerre. Mais que reste-t-il pour entretenir la mémoire des civils belges exilés en France ? À part à Rouen et au Havre, peu de choses. Ainsi le cimetière des Belges de Neuville-sous-Montreuil, dans le Pas-de-Calais, a disparu du paysage. Pourtant les registres communaux renferment les actes de décès de 599 civils belges décédés entre 1915 et 1919. Ils étaient originaires du Westhoek (Ypres). Cet oubli collectif peut s’expliquer par le ressenti des Belges de l’Intérieur vis-à-vis de ceux qui avaient quitté le pays. De plus, la population française ne nourrissait pas toujours des sentiments de solidarité vis-à-vis de ces envahisseurs. Finalement le réfugié apparaissait tel le miroir de nos peurs engendrées par cette guerre qui n’en finissait pas.

Abondante bibliographie et nombreuses illustrations.

Jacques Goyens